Lucien se leva assez tard, se remettant encore du combat d'il y a deux jours, et de son déroulement fort inattendu.

Aujourd'hui, il devait retourner dans l'arène, et allait réellement devoir rivaliser d'ingéniosité. Avec deux sorts à sa disposition, il serait fortement difficile de rivaliser avec le gardien des secrets de l'académie en personne, que les rumeurs qualifiaient de démon nudiste misogyne et excentrique, et qu'il avait eu le privilège de rencontrer dans les sous-sols. Et que pouvait donc faire face à un tel adversaire lorsque tout ce que l'on peut faire est se transformer en rossignol, ce qui ne doit être utilisé qu'en dernier recours, et créer un mur d'ombre ?

(À vrai dire, Lucien faisait tout pour oublier ce gardien. Déjà que la vie à l'académie était vraiment bizarre, ce démon l'était bien trop, et il devait s'accoutumer à une chose à la fois. De plus, se découvrir un ancêtre nécromant qui résidait dans son corps était prioritaire sur le fait d'accepter que ce type existe.)

Il ne fit pas grand chose de la matinée, qu'il passa en forme aviaire dans l'enceinte du festival, à essayer de s'accorder avec son pouvoir après avoir mangé. Il communiqua avec lui longuement, échangeant des projets et lui exposant son passé pour lui permettre de mieux se connaître. Il aborda les journées passées à comprendre la serrurerie, les jeux faits avec Blanche, une amie d'enfance (qui ressemblait beaucoup à Ornòrä) quand les précepteurs avaient le dos tournés, mais surtout la discipline qui avait réglé la majeure partie de sa vie, à part ces éléments précités et quelques autres, dont les escapades nocturnes faites en tant que rossignol.

Il ne visita pas Lewis, désirant gagner par lui-même.

Finalement, l'heure vint. Et se sentant en harmonie avec lui-même, le rossignol s'envola et alla dans l'arène, avant de se retransformer à l'abri des regards.
Le discours de Myrddin avait un peu changé de celui d'il y a quelques jours, et lorsqu'il appela le premier des combattants "le benjamin de la maison d'Elenor qui a déjà combattu sous vos yeux naguère, et dont la magie de l'Ombre pourrait vous étonner", il sentit comme des millions d'yeux indiscrets posés sur lui, le jaugeant impitoyablement. Il s'efforça de ne pas prêter attention, et se jura de faire meilleur effet que la dernière fois.

Méphisto surgit à son tour, d'une manière inattendue comme à l'accoutumé. Le silence du public à son apparition, suivi d'innombrables chuchotements incompréhensifs, en disait long sur son entrée.



Le combat débuta, et aussitôt le sourire moqueur du démon se fit ressentir. Il allait certainement devoir l'impressionner.

- Mesdames et messieurs, mon adversaire se trouve être une personne exigeante que mes capacités seules en magie ne sauront forcément... distraire. Aussi... oh, et puis zut.

Cette phrase ne fut absolument pas entendue par ce public bruyant, et de plus il ne savait pas quoi faire. Chanter un air ? L'idée lui vint, et il se mit à faire comme un rossignol, répétant du mieux qu'il pouvait l'air qui lui venait en tête, et qui semblait inventé par l'animal qui avait eu le temps de composer, étrangement. Il était assez guilleret, mais réellement dépourvu de sens et de mesure.


Ne sachant réellement que faire, Lucien décida d'entourer l'endroit où se tenait son adversaire de quatre murs, chacun invoqué l'un après l'autre, tous très larges et très hauts. Ayant eu la mauvaise idée de commencer par en poser un devant lui et le démon avant de l'entourer, il ne savait pas si cela allait fonctionner.

Ensuite, il invoqua un mur en l'air, large comme l'aire entre les murs, juste au dessus de la zone délimitée, et laissa la gravité faire son effet.